Face aux milliards d’euros de ventes de grandes marques comme Gucci et Prada, les contrefaçons de luxe dans les rues de Naples génèrent elles aussi un flux financier massif.
La métropole méridionale est le cœur du marché italien de la contrefaçon, estimé entre 6 et 7 milliards d’euros, où les faux sacs à main, lunettes de soleil, vêtements et chaussures fleurissent, vendus au vu et au su de tous. Mode, jouets, électronique, alimentation ou produits pharmaceutiques, les contrefaçons représentent 2,5% du commerce mondial, évalue l’OCDE.
Un terreau fertile pour la contrefaçon
Naples détient le titre peu enviable de capitale européenne de la contrefaçon. Elle abrite toutes les étapes de la chaîne, de la fabrication à la vente, le tout dominé par la mafia locale, la Camorra.
Un héritage artisanal dans les domaines de la couture et du cuir, un port international, un taux de chômage élevé et un afflux de main-d’œuvre étrangère bon marché ont contribué à faire prospérer la contrefaçon.
Si de nombreux consommateurs ne se préoccupent pas des contrefaçons, l’emprise de la Camorra sur ce secteur en fait de plus en plus une priorité pour les autorités.
Une économie parallèle contrôlée par la mafia
Les marges générées par la contrefaçon sont inférieures à celles de la drogue, mais elles génèrent tout de même de l’argent liquide et aident à blanchir l’argent de la drogue avec un faible risque de sanctions pénales. La Camorra utilise déjà la clientèle de touristes pour acheter les produits contrefaits qui génèrent des profits pour l’organisation criminelle.
L’impact négatif de la contrefaçon sur l’économie napolitaine, notamment en termes de perte d’emplois et d’impôts non payés, est colossal. Le gouvernement italien a estimé cette perte à 17 milliards d’euros en 2020.
Il y a d’autres conséquences, une grande partie des incendies toxiques qui se déclarent chaque année dans la région de Naples sont dus à l’élimination des déchets de contrefaçon qui ne respectent pas les normes de sécurité.
La trajectoire des produits contrefaits
Si les contrefaçons de meilleure qualité sont fabriquées localement, la plupart des produits sont importés de Chine et de Turquie, via un système bien huilé.
Les criminels choisissent des ports européens très fréquentés, comme Rotterdam, ou des ports aux contrôles moins stricts, comme en Grèce ou en Bulgarie, avant d’atteindre l’Italie par camion. Une fois dans la région de Naples, la dernière étape est réalisée dans des ateliers par une main-d’œuvre clandestine bon marché.
Les étiquettes sont souvent expédiées séparément et cousues en dernier, ce qui rend plus difficile la détection par les douanes.
La lutte contre la contrefaçon
Les grandes marques dépensent massivement pour lutter contre ce fléau. Même les entreprises plus petites commencent à mettre en place une protection juridique, à enregistrer des brevets tout en investissant dans de nouvelles technologies de traçage.
Il est également essentiel d’éduquer les consommateurs. Une étude menée en 2023 a révélé qu’un tiers des citoyens de l’UE envisageraient d’acheter des contrefaçons si les originaux étaient trop chers. Cette proportion monte à un sur deux chez les jeunes.
Indicam, l’association italienne pour la protection de la propriété intellectuelle des marques de mode, demande à l’UE d’harmoniser les règles relatives au traitement des contrefaçons saisies, et de mettre fin à la pratique de faire payer aux marques le stockage ou la destruction des produits contrefaits.
En conclusion, la contrefaçon à Naples est un véritable fléau qui prospère grâce à la présence de la mafia locale, la Camorra. Les autorités italiennes et les grandes marques doivent unir leurs forces pour lutter contre ce crime qui impacte négativement l’économie locale et met en danger la sécurité des consommateurs.